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Résumés de livres
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MON DIEU... POURQUOI
Par Abbé Pierre (avec Frédéric Lenoir) - Éditeur Plon
(2e partie)
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- Absence et présence de Jésus
- Souvent, je me suis demandé pourquoi Jésus n'est-il pas resté parmi nous. A notre époque, quel succès médiatique il aurait! Mais ce ne serait qu'une idole extérieure… Et pour rentrer en relation intime avec Lui, il faut fermer les yeux du corps, et ouvrir ceux du cœur.
Il continue ainsi à parler et à agir en chaque chrétien. Quand je rencontre les blessés de la vie, j'entends Jésus les appeler par leur prénom, et j'essaie de leur dire aussi par ma voix, simplement leur prénom avec amour. Le christianisme, c'est une rencontre de personne à personne, c'est l'Évangile qui continue.
- L'Eucharistie, cœur des communautés chrétiennes.
- Jésus a trouvé cet extraordinaire moyen de rester présent de façon cachée parmi nous. C'est à la fois le testament de Jésus et l'actualisation de sa présence parmi nous. Ce n'est qu'un insignifiant morceau de pain, et les chrétiens de diverses tendances conçoivent différemment l'Eucharistie. Pour les catholiques, la substance du pain est transformée par les paroles du prêtre en la substance de Jésus... Pour la plupart des protestants, le pain consacré n'est pas le corps du Christ, mais le symbole de sa présence parmi nous.
Personnellement je me place dans une voie médiane, je ne me préoccupe pas de la transsubstantiation, mais uniquement de SA PRÉSENCE. Je ressens souvent une immense tendresse devant le saint sacrement dans une église. Une mère de famille devant une religieuse lui a dit : « Comment es-tu toujours si souriante, sans mari et sans enfant? » Elle lui répondit : « C'est que je sais que je suis aimée de Celui que j'aime ». L'Église n'a peut-être encore de sens que parce qu'elle maintient la présence eucharistique.
- Revenir au christianisme des premiers siècles
- L'Église a souvent montré un visage odieux, en confondant les pouvoirs temporels et spirituels... Les papes sont ainsi devenus des rois, dès le 4e siècle avec Constantin, qui a fait du christianisme la religion officielle de l'Empire romain.
Mais Jésus a bien insisté sur la séparation des pouvoirs (« Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ») et Il a refusé les habits du chef politique
que ses disciples attendaient. Puis est malheureusement venu le
temps de la « chrétienté », jusqu'aux « Lumières» et aux révolutions, où l'Église a perdu sa puissance et son influence temporelle. Le Concile de Vatican II a pris acte de cette évolution, la saluant comme la possibilité pour les catholiques de revenir aux sources évangéliques. C'est la fin de l'ère constantinienne.
Mais la papauté reste trop puissante encore ; le pape est élu a vie comme un empereur, Il ne faut pas le supprimer, mais revenir à une fonction plus modeste. Il faut libérer l'Église de la tutelle romaine sur toutes les églises locales, de son centralisme politique et juridique, pour pouvoir réconcilier tous les chrétiens dans l'unité.
- Les Évangiles
- Ils n'ont pas été écrits par des observateurs neutres, mais par des croyants qui ont vécu, médité, digéré ces actes et ses paroles, avant de les mettre par écrit. Cela doit nous inciter à ne pas prendre ces textes au pied de la lettre dans une lecture littérale (? de la rédaction). Pour moi, je préfère l'Évangile de Jean. Dès les premiers mots (« au Commencement était le Verbe »), il ouvre le chemin dans lequel ma vie spirituelle s'est développée depuis ¾ de siècle : le mystère du verbe incarné.
- La Sainte Trinité
- Un autre mystère : Dieu en trois personnes. Novice dans l'ordre de Saint-François, j'ai alors découvert cette parole de Dieu à Moïse : « Je suis Celui qui suis ». Après des rêveries panthéistes, j'ai eu une révélation en découvrant cette parole : « JE SUIS ». Et je me suis senti appelé à une union avec « JE SUIS ». Et j'ai tout de suite associé JE SUIS à l'Amour : JE SUIS est l'aimable. Dieu est Père, car Son être est Amour, et l'amour se diffuse spontanément.
Et même si c'est incompréhensible pour l'intelligence humaine, le mystère de Dieu UN en TROIS personnes ne me choque pas, car j'en saisis par le cœur la raison. Si Dieu est Amour Il ne peut qu'être fécond...
- Liberté et hyper-liberté
- Le christianisme a toujours insisté sur la liberté de l'homme. Même de croire ou non, et de suivre ou non les commandements de Dieu. C'est fondamental, car si Dieu nous forçait à l'aimer, quelle valeur aurait cet amour?
Mais il y a aussi des façons dominatrices dans certains amours (p.ex. celui des parents pour leurs enfants) Il y a aussi une manière plus respectueuse de l'autre : se révéler à lui tellement bon qu'il ne peut pas faire autrement que de nous aimer. C'est pourquoi Dieu s'est voilé à nous ; nous ne pouvons Le connaître que de manière indirecte. Toute la grandeur de l'homme c'est de pouvoir aimer Dieu dans la foi, sans Le toucher ou Le voir.
J'ai alors réfléchi (dans le cadre trinitaire) sur la liberté des personnes divines : il est impensable que le Verbe puisse être en désaccord avec le Père. Et pourtant le Verbe est libre, mais totalement dans la lumière du Père. Le mystère de la Trinité, je l'appelle « hyper-liberté », la véritable liberté qui nous met dans l'impossibilité de nous disputer et d'avoir des vues divergentes. Alors pourquoi, à nous, ne nous a-t-elle pas été donnée?
- Le péché
- Il ne doit pas être nié. C'est ce qui aliène la liberté humaine et coupe l'homme du plus profond de lui-même, de la vérité et de la relation à l'autre et à Dieu. Mais on a beaucoup trop insisté sur l'acte. Ce qui est bien plus important, c'est l'habitude de l'acte.
Un acte isolé (crime passionnel, adultère d'un soir, etc.) n'est pas de même nature que sa répétition, à laquelle on s'habitue, et qui engage bien plus notre liberté et notre responsabilité. Alors, banaliser ses actions perverses par toutes sortes d'alibis, c'est le « pli « du péché, infiniment plus grave que l'acte isolé.
C'est important à rappeler pour ceux qui succombent à une douleur momentanée, à une erreur de jugement ou à une pulsion, pour qu'ils puissent tout mettre en œuvre pour ne pas recommencer. On pourrait alors parler de « vice », de même que la répétition d'un acte bon devient une vertu. Le vrai péché, c'est le vice, soit l'installation dans un comportement destructeur pour
nous-mêmes et pour les autres.
Cela ne signifie pas que Dieu ne pardonne pas aux uns
comme aux autres, même aux plus vicieux… C'est la raison pour laquelle Jésus nous a dit (bien avant Freud) « ne jugez pas ». Et ce n'est pas une raison non plus de ne pas lutter de toutes nos forces pour éviter de recommencer.
- L'enfer existe-t-il?
- Aucun Concile n'a jamais affirmé l'existence de l'enfer. Mais la prédication a souvent utilisé la peur de l'enfer pour convertir les âmes. Plus je médite sur le mystère du Dieu Amour, plus je suis persuadé qu'il est impossible qu'une personne – ange ou humain – puisse librement Le rejeter.
Théoriquement seul l'idolâtre de soi-même peut refuser l'amour de Dieu pour ne dépendre de personne. L'enfer ce pourrait être cela. Je n'arrive pas à croire qu'un être en pleine possession de ses moyens choisisse le Mal. Seul un lien, dont on peut le libérer, peut éclairer sa conscience ; l'attraction du Bien est plus forte que tout.
- Révélation historique et Révélation invisible
- La formule « Hors de l'Église, pas de salut » m'a toujours profondément choqué. Comment notre Dieu d'Amour ne se révélerait-il qu'à la petite population des baptisés? C'est absurde.
Il y a donc deux révélations possibles : d'abord celle visible dans la Bible et la connaissance de Jésus-Christ. La seconde , invisible et mystérieuse, qui n'a pas de prophètes, mais qui touche le cœur des hommes pour les inspirer à choisir le Bien plutôt que le Mal, le service des autres plutôt que l'adoration de soi. Ceci, aussi existe dans d'autres religions, ou même sans religion.
C'est vrai que les chrétiens sont plus responsables; mais cette autre révélation mystérieuse, invisible, concerne tout homme. La conscience de chacun peut s'éveiller pour consentir au «
tu aimeras ».
- Le fanatisme religieux
- Les actes terroristes sont épouvantables et se généralisent hélas dans toutes les familles religieuses de l'Humanité. En relisant l'histoire des croisades j'ai été frappé par la gigantesque entreprise de domination qu'elles furent. Il reste de cette période de deux siècles des traces profondes chez les musulmans et chez les orthodoxes, pillés et massacrés eux aussi. Et la croisade actuelle menée par George Bush, malgré de beaux discours, cache aussi je pense de bas calculs politiques et économiques. L'histoire se répète, hélas. Fallait-il répondre à l'Al Quaida en entraînant le monde dans une nouvelle guerre entre civilisations chrétienne et musulmane, alors qu'on aurait pu l'éviter avec plus de sagesse et de retenue?
- Épilogue : Lettre à Dieu
- Père, je vous aime plus que tout.
Parce que...
Oui, Vous êtes mon amour.
Oui, mais... je ne pourrai jamais accepter la permanence du Mal...
Croyant, quand même je ne comprends pas. Trop de mes frères humains restent au bord de vous aimer… Pitié, pour eux, et pour l'Univers.
FIN
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