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Les trois Adams.

  

*Témoignages*

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SAMUEL PFEIFER
La psyché a la cote sur le marché

Extrait de la Revue ACTE "AME-PSYCHÉ"
N0 136, 37e année, IV 1999


LA PSYCHÉ A LA COTE SUR LE MARCHÉ
 
Dr. med. Samuel Pfeifer, psychiatre et psychothérapeute, médecin-chef de la clinique psychiatrique de Sonnenhalde, à Riehen, près de Bâle. Le Dr. S. Pfeifer est bien connu par ses livres, ses articles, ses conférences et ses séminaires.
 
Il tient avant tout à ce que chacun puisse comprendre les troubles psychiques et retrouver l'espoir. À ses yeux, il est important de conjuguer la médecine et la foi, de faire coopérer le médecin, le thérapeute et le conseiller spirituel.


GLISSONS-NOUS DE LA SOCIÉTÉ NANTIE
VERS LA SOCIÉTÉ THÉRAPEUTIQUE?

 
"Si vous avez un vague sentiment de frustration - et si vous souhaitez aller au fond des choses : Bruno B., Thérapeute, Zurich". J'ai trouvé cet appel récemment dans une annonce. 
 
Pour la seule Allemagne, on dénombre 14 000 psychothérapeutes de formation universitaire; 30 000 étudiants potassent la psychologie. Le nombre de thérapeutes, conseillers, astrologues et guérisseurs dépassent largement celui des prêtres et des pasteurs des églises chrétiennes.
 
C'est un paradoxe. Dans le fond, le contexte n'avait jamais été aussi favorable qu'aujourd'hui. 
 
Jamais nous n'avions connu une situation aussi sûre. Jamais une part si importante de la population n'avait joui d'une certaine prospérité. Jamais les filets sociaux n'avaient couvert autant de surface.
 
En fait, les gens devraient être beaucoup plus heureux que jadis. Et pourtant, jamais autant de personnes ne se sont trouvées en thérapie. Comment expliquer un tel paradoxe? Qu'est-ce qui incite les gens à épancher leur âme pour recevoir une aide professionnelle dans l'organisation de leur existence?


LA PSYCHOTHÉRAPIE, ERSATZ DE LA RELIGION?
 
Un hebdomadaire illustré écrivait voici peu de temps : "Pour nombre de nos contemporains, la psychothérapie s'est muée en ersatz de la religion. Le nouveau message du salut s'était développé et prodigieusement répandu dans les années soixante-dix, à la fin de l'époque des idéologies prétendant refaire le monde. Quand sonna le glas de la Révolution et de la lutte des classes, quand la mode se mit à oublier Marx et Mao, on vit s'amorcer le vaste mouvement vers l'intériorité, vers le Moi personnel. C'est là, et plus sur les barricades, que devait commencer désormais la recherche du vrai bonheur."
 
La désaffection croissante des églises a multiplié le nombre de ceux qui s'adonnent à un sens privé de leur existence et ne s'obligent plus à penser sans cesse aux autres. Les besoins les plus immédiats servent de boussole. À grands traits, on peut les caractériser ainsi : bonheur, prospérité, jouissance; santé, protection, quiétude, énergie; pouvoir et influence; amour, sécurité, aptitude sexuelle; accès à l'inconscient, clarification et purification intérieures. 
 
MAIS il y a un mais : pouvons-nous prendre ainsi forfaitairement la psychothérapie comme religion de rechange? Ne devient-elle pas vitale pour nombre de gens qui n'ont plus d'autre moyen de maîtriser l'existence? On peut distinguer dès lors deux sortes de thérapies :

  • la psychothérapie destinée à traiter les troubles psychiques et 
     
  • la thérapie tenant lieu de philosophe existentielle et vouée à la quête d'un plus grand bien-être. 

Tandis que la psychologie humaniste a servi longtemps de support fondamental de la psychothérapie, on voit s'accentuer depuis quelques années la "recherche du sens" ou - pour employer un autre cliché - "la fuite dans la spiritualité". Environ 200 thérapies de divers types proposent leur aide aujourd'hui et forment une jungle presque impénétrable - de la technique d'Alexander à la thérapie primale en passant par la visualisation, de la consultation astrologique à la méditation zen en passant par la kinésiologie.


LE BESOIN DE SANTÉ - LA NOSTALGIE DU SENS
 
La priorité des priorités, c'est de jouir d'une bonne santé. Mais la notion de maladie a été étendue de manière inadmissible. La définition de la santé selon l'OMS est célèbre et redoutée : "un état de complet bien-être physique, mental et social". Mais qui donc se trouve en bonne santé sur de telles bases? Le sentiment de malaise à l'égard de la médecine scolaire et les espoirs qu'ont fait naître les promesses des médecines alternatives sont un autre facteur de l'inflation thérapeutique. Enfin, il y a la recherche d'un sens personnel et d'expériences positives, à l'abri des obstacles et des limites extérieures. L'idéal de la réalisation personnelle positive devient une contrainte sournoise.
 
Tant que le quotidien se déroule conformément au plan, la question du sens de la vie ne se pose pas. Cette interrogation ne surgit qu'en cas d'ébranlement de l'ordre établi. 
 
Ou quand les années insouciantes de la jeunesse mènent de plus en plus vers un itinéraire programmé, quand les responsabilités familiales et professionnelles entravent toujours plus la liberté personnelle, quand la disparition d'un être cher vient nous rappeler notre propre mortalité ou quand la perte d'une place de travail réputée stable nous fait savoir que tout n'obéit pas à notre volonté.
 
Des enquêtes ont révélé que plus de deux tiers des femmes suivant une thérapie ont plus de trente ans. L'érosion de la répartition traditionnelle des rôles oblige chacun à trouver ou assumer un sens personnel. Michael Nüchtern a écrit : "On cherche la sécurité et les certitudes par les expériences intérieures et le vécu personnel. Un marché très étendu de moyens et de consultants propose son aide. Le domaine de la thérapie offre le moyen de maîtriser les crises individuelles dans un contexte de crise générale."


LES LIMITES DE LA SOCIÉTÉ THÉRAPEUTIQUE
 
Je serais ravi si les thérapeutes étaient réellement capables de rendre heureux. Mais ceux qui sont à la recherche d'un sens sont souvent déçus de leur thérapie et se tournent vers de nouvelles promesses de guérison, pour atteindre peut-être quand même le but espéré. Et la thérapie revêt un caractère élitaire: elle semble réservée à ceux qui disposent d'assez de temps, de liberté et d'argent. Mais qui assiste les victimes de la guerre civile en ex-Yougoslavie? Qui soutient les failles de l'Afrique noire face à la terrible détresse liée à l'épidémie de SIDA, pour ne citer que ces exemples?
 
Une autre question se pose au niveau des échelles de valeurs: les impressions personnelles sont-elles suffisantes pour guider notre pensée et notre action? Quelle est l'influence de la perte des valeurs sur nos relations?
 
Le psychothérapeute Jürg Willi parle de l'écologie relationnelle. Il estime que l'idéologie de la réalisation de soi nous a conduits à une catastrophe écologique au niveau de nos relations. Tout comme on détruit la Forêt vierge pour tirer des avantages à court terme, on détruit aujourd'hui les relations, sans en mesurer les conséquences à long terme.
 
Mais cette critique sévère du système recèle un autre danger, qui serait de refuser à certains êtres l'aide dont ils ont besoin à un moment difficile de leur parcours. Il ne s'agit pas de faire le procès global de la psychothérapie et de la liquider, mais de se demander comment nous pouvons parvenir à une compréhension étendue de l'être humain pour l'aider à bon escient?


TROUBLES PSYCHOSOMATIQUES
 
On admet généralement que 10 à 20 pour-cent de la population souffre par moments de dépressions ou d'angoisses qui requièrent un traitement au sens plus étroit. Les détresses de l'âme se traduisent par des symptômes physiologiques. Notre langage ne manque pas d'images pour traduire la relation entre le corps et l'âme :

  • On se casse la tête pour résoudre un problème.
  • Quelque chose nous est resté sur l'estomac.
  • On a le cœur lourd et l'émotion nous serre la gorge.
  • "Tantôt la peur nous donne des ailes aux talons… tantôt elle nous cloue les pieds et les entrave." (Montaigne)

De telles manières de s'exprimer ne sont pas un simple langage fleuri pour refléter des sentiments. Elles traduisent le lien entre les conflits intérieurs, le système nerveux et le corps. La Bible connaît déjà ces relations. Les psaumes sont riches en images psychosomatiques. David se plaint : "L'opprobre me brise le cœur, et je suis malade." (Psaume 69) En termes saisissants, il décrit sa peur d'enfoncer dans la boue - ce sentiment panique insupportable de n'avoir plus aucun fond.


TOUT EST-IL MENTAL? 
 
Quand on dit psychosomatique, nombreux sont ceux qui pensent que de tels maux ne sont pas de vraies maladies, mais qu'elles sont provoquées par le refoulement des vrais conflits, de caractère moral. "Mais ça n'est que psychique!" Ainsi, l'affaire est balayée. Et les personnes concernées ne se sentent pas prises au sérieux, même en face des médecins.
 
Fondamentalement, il existe quatre causes de troubles psychiques : Tout d'abord, les prédispositions héréditaires, une tendance exacerbée à réagir par des symptômes physiques. Le deuxième facteur est souvent lié à l'enfance et à l'adolescence: des rapports familiaux tendus, des expériences de violences, mais aussi une éducation protégeant ou gâtant à l'excès, qui peut accentuer la tendance. Une sensibilité excessive peut se développer, traduisant de plus en plus les expériences pénibles de l'existence par des troubles psychiques ou physiologiques. 
 
Ainsi se perd le sentiment d'insouciance. il suffit dès lors d'un facteur propice (une perte, une défaillance ou d'autres conflits relationnels) pour déclencher une crise psychique.
 
Mais les troubles psychosomatiques ne sont pas toujours le reflet d'une hypersensibilité générale. Je connais bien des personnes foncièrement disposées à la relation, performantes et habituées au succès, qui, en cas de charge extrêmes, donc sous un stress intense, ont des troubles cardiaques ou des ennuis gastriques, des maux de tête ou des blocages de la nuque. De tels symptômes ont aussi un caractère psychosomatique, mais les bien portants digèrent leurs troubles différemment et ne s'en trouvent pas tellement handicapés s'ils prennent les signaux d'alarme au sérieux.


VICTIMES OU RESPONSABLES?
 
Plus un trouble névrotique psychosomatique est prononcé, plus on a tendance à penser parfois que le patient est une victime impuissante et involontaire de ses désordres physiologiques, ballottée comme une coquille de noix sur un océan déchaîné, sans espoir et sans possibilité d'agir sur ses affections. On me demande souvent : "Est-ce que ma femme n'y peut vraiment rien, ou est-ce que par ses troubles, elle veut fuir quelque chose?"
 
Voilà un danger : Les affections psychosomatiques n'infligent pas seulement des handicaps et des tortures, elles peuvent aussi procurer des avantages dans certaines circonstances. La sensibilité au bruit peut dispenser de participer à une soirée embêtante; les maux de tête peuvent être un motif bienvenu de ne pas répondre aux propositions de relations intimes d'un mari. De tels avantages sont appelés "bénéfices secondaires". Les troubles peuvent d'abord avoir été le réel motif de ne pas faire quelque chose. Mais il se peut que plus tard, les symptômes reviennent régulièrement lorsque des facteurs désagréables provoquent une tension interne. Ainsi une patiente m'avoua un jour : "Cette crise d'asthme est bien tombée. Elle m'a évité de devoir partir avec mon ami pour un voyage que je n'avais pas envie de faire de toute manière."
 
Mais il serait cynique d'en conclure que tous les asthmatiques cachent une manœuvre dilatoire derrière leur détresse respiratoire. Chaque symptôme ne prend sa signification que dans le tissu des relations. Il faut donc beaucoup de sagesse, de l'expérience et une bonne dose de science médicale pour classer les phénomènes psychosomatiques.
 
Il importe d'autant plus de prendre un être humain au sérieux dans l'ensemble des données de son existence. Même si la discussion est primordiale, la description de médicaments peut être parfois la seule voie correcte pour rétablir l'équilibre des neurotransmetteurs dans des contextes particulièrement pénibles. Les médicaments peuvent souvent soulager rapidement des souffrances psychosomatiques. Il y a des situations et des circonstances dans lesquelles le refus d'une médication efficace devient une faute professionnelle qu'aucune considération psychotechnique ou argumentation spirituelle ne peut justifier.
 
Mais celui qui se limite au plan médicamenteux commet une faute lui aussi dans l'exercice de son art. Car il apparaît à l'évidence qu'avant la modification biochimique, il existe toute une série de facteurs d'influence qui contribuent largement à l'évolution. Et à ce niveau, le dialogue - la cure d'âme dans le contexte chrétien - prend sa place.


DES SIGNAUX D'IMPORTANCE VITALE
 
Comment pouvons-nous gérer nos troubles psychosomatiques? Il y faut, à mon avis, une discussion à trois niveaux : un dialogue avec moi-même, un dialogue avec Dieu et un dialogue avec le prochain. Parler avec moi-même; les symptômes psychosomatiques sont des signaux d'alarme sur le tableau de bord de notre existence. Ils nous indiquent ce qui ne va plus dans notre vie. Dans le dialogue intérieur, il y a donc lieu de se demander : quel est le message de mes avertisseurs psychosomatiques? - Où ai-je trop de tensions ou de conflits? - Où suis-je dans l'erreur avec mes valeurs? - Où est-ce que mes perceptions sont trop stressées, au point de fausser mes priorités? - Où suis-je trop sensible? - Où pourrait-il y avoir un correctif nécessaire que je refuse depuis longtemps déjà? Le langage de la foi est encore plus net : Où est-ce que Dieu veut me dire quelque chose que je refuse constamment? - Où veut-il me montrer quelque chose qui me heurte tellement que je le repousse sans cesse? - Où est-ce que je me sers de mes troubles physiques pour me soustraire à mes tâches ou pour éviter des relations délicates? 
 
Parler avec Dieu?... nous ne sommes pas seuls dans ce monde! Nous pouvons parler avec Dieu comme avec un ami, ouverts à l'amour, mais ouverts aussi à la déception et au reproche. Nous osons demander même avec dépit : "Seigneur, pourquoi me laisses-tu planté sous la pluie?" Les psalmistes peuvent nous servir d'exemple. Ils n'ont pas seulement entonné des hymnes de louanges harmonieux pour un Dieu inaccessible. Ils ont parfois osé un langage assez vif avec Dieu. Ils ont crié leurs peurs, leur haine pour leurs ennemis, leur déception face au silence de Dieu, à l'interminable attente de son intervention. Dans la prière, nous osons nous soulager devant Dieu, comme nous n'oserions peut-être pas le faire devant les hommes.
 
Parler avec d'autres gens : Une discussion peut souvent avoir plus d'effet que beaucoup de tranquillisants. On n'a pas toujours besoin d'un thérapeute professionnel ou d'un conducteur spirituel. Vous avez peut-être confiance en quelqu'un? Vous faites peut-être partie d'un groupe de discussion, d'un groupe de maison?


DE L'AIDE, MAIS PAS LE SALUT
 
Cette triple conversation peut donner un nouveau courage pour prendre ses responsabilités, ou même vivre sa vocation. Le célèbre philosophe et psychiatre Karl Jaspers a constaté : "Il faut des bases de foi pour une psychothérapie, mais elle ne peut pas les procurer. Pour que le thérapeute soit crédible, il est donc nécessaire qu'il soit capable d'affronter de manière ouverte et affirmative une foi authentique." Par mon expérience de psychiatre et de thérapeute, il m'importe donc de prendre au sérieux la valeur de la foi pour maîtriser l'existence. Dans mon activité quotidienne, je vois sans cesse le puissant soutien de la foi chez des êtres qui ne correspondent pas aux normes de ce monde, mais qui doivent vivre avec des faiblesses et des limites.
 
Trois axiomes sont déterminants pour moi: la psychothérapie peut apporter une aide, mais pas de salut. Elle peut procurer du réconfort, mais pas le pardon. Et elle peut offrir un accompagnement utile dans cette vie, mais pas une assurance pour la vie éternelle.
 
J'en reviens donc à notre annonce du début : "Si vous avez un vague sentiment de frustration - et si vous souhaitez aller au fond des choses", ne vous contentez pas d'une psychothérapie, mais recherchez les valeurs éternelles!

- FIN -

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