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INTERVIEW DE TIM PHILPOT
Sur le champ de bataille de la politique
Ex-sénateur du Kentucky
(avant les événements du 11 septembre 2001)
Monsieur Tim Philpot (né en 1951, marié à Sue) est avocat et a travaillé pendant
plus de 20 ans comme pénaliste. A partir de 1990, il a représenté pendant deux législatures l'État
américain du Kentucky, en qualité de sénateur à Washington.
Question (Q) : M. Philpot, quelles sont à vos yeux les tendances essentielles de notre
époque?
Réponse (Ph) : La tendance la plus importante, c'est le constat que le monde change de plus
en plus rapidement. Pour le monde des affaires, cela signifie qu'il faut toujours être au top du
moment. Plus personne ne peut prendre du bon temps et penser : "Si je fais mon travail
comme jusqu'ici, je suis tranquille pour les 20 prochaines années." Ce changement doit
attirer spécialement notre attention.
En raison de cette évolution, chaque Société doit décider quelles sont ses valeurs immuables. Il
faut savoir que la tendance actuelle est le changement brusque et rapide. S'y ajoute aussi
l'accélération des moyens de communication actuels. Il faut donc pouvoir agir à la fois rapidement
et rester flexible. Ce sont les entreprises qui agiront en fonction de cette situation qui réussiront.
Mais si votre décision doit d'abord passer par de nombreux comités ou commissions, vous avez déjà
perdu.
Q : Quelles sont les tendances politiques qui atteindront sans doute prochainement aussi
l'Europe?
Ph : En ce moment, l'Amérique se sent très bien, parce que son économie a de nouveau une base
solide. Il en résulte une sorte d'euphorie qui génère en même temps une sorte de paralysie. Personne
ne s'inquiète des problèmes essentiels, puisque l'argent n'en est pas un : "tout est ok!"
Nous avons construit en Amérique une société dont la bonne conscience de sa propre valeur est fondée
uniquement sur l'économie et la prospérité; je l'observe avec inquiétude. Dans les écoles, des
enfants sont tués par leurs propres camarades; l'abus des drogues et la criminalité se développent;
l'avortement est sans freins; et les familles se brisent davantage, au point que certains enfants ne
connaissent même pas leurs parents. Pourtant personne ne s'en soucie, tant qu'il y a du fric!
C'est une tendance dangereuse qui va certainement s'étendre vers l'Europe.
Q : On vous demande sans doute souvent comment vous avez pu concilier la politique et vos
convictions chrétiennes. Comment avez-vous réussi à intégrer votre vision chrétienne dans votre
travail de sénateur US?
Ph : Il est difficile, c'est vrai, d'être politicien et chrétien; car une tâche de base pour
un politicien qui désire être élu consiste surtout à convaincre les électeurs qu'il est un type bien!
En effet, dans toutes les campagnes électorales dans lesquelles on est impliqué, il s'agit de faire
bonne figure et de prétendre qu'on est bon, de même que son propre parti; par la force des choses,
chaque politicien tente de donner cette impression : - si vous votez pour moi, le monde
sera un tantinet meilleur!
C'est naturellement en désaccord avec la Bible qui dit que je ne peux être un homme bon. En effet,
elle affirme que la vie éternelle n'est donnée qu'à ceux qui s'humilient. L'un des premiers pas vers
le salut consiste d'abord à reconnaître que je ne suis pas vraiment bon. Le fait de s'avouer qu'on
n'a pas de réponse est un élément essentiel de la foi chrétienne. Et il est évident que si on
reconnaît en politique que "je n'ai pas beaucoup de bonnes réponses, je ne suis pas bon, mais
pécheur", l'on n'aura aucune chance d'être élu! C'est pour ces raisons qu'il est effectivement
très difficile d'être en même temps un politicien et un vrai chrétien. Être chrétien demande de
l'humilité, et une sorte de brisement de notre esprit, et en plus, l'obéissance à la Parole de Dieu.
Je considère donc que c'est une sorte de miracle pour moi d'avoir été élu... et même réélu! Dans ces
conditions, les 8 ans passées comme sénateur du Kentucky ont été pour moi un temps fascinant, mais
aussi, très difficile.
Q : Avez-vous eu à prendre ou à partager des décisions qui ont posé un problème à votre
conscience de chrétien?
Ph : Parfois oui, car la politique vit souvent de compromis sommaires. Et de nombreuses
décisions législatives que nous prenons ne constituent pas obligatoirement LA bonne réponse... C'est
rarement un choix entre le noir et le blanc; on doit toujours à nouveau soupeser quelle décision
correspond le mieux à ses propres principes d'une part, et à la situation donnée, d'autre part.
Pour certaines alternatives, on sait d'avance que toute décision est en partie juste et en partie
fausse. Quoi que l'on fasse, on sera l'objet de critiques - critiques des autres, mais aussi
des siens. J'ai également dû prendre parfois des décisions dont j'étais convaincu qu'elles étaient
les meilleures pour la majorité des citoyens que j'avais à représenter, mais qui ne correspondaient
pas forcément complètement à ce que je tenais personnellement pour le meilleur...
Q : Pouvez-vous nous en donner un exemple?
Ph : Dans le Kentucky, l'économie est basée principalement sur le tabac, le whisky et les
paris mutuels! Ma conviction chrétienne me disait que tout cela était pour le moins douteux. Les
compromis que j'ai dû accepter me mirent souvent dans des conflits de conscience. Ce qui est
toutefois positif, c'est que les chrétiens prennent au moins conscience que ce conflit existe...
Q : Classer la politique du point de vue chrétien comme une affaire malpropre est donc une
solution trop facile. Où voyez-vous les forces et les chances du chrétien dans ce travail, en
politique de tous les jours?
Ph : La meilleure des choses, c'est sans doute que pour un chrétien engagé, on peut se dire que
Dieu a dans ce gouvernement au moins une voix qui L'écoute! C'est pour cette raison que je considère
qu'il est très important que nous ayons des chrétiens convaincus dans tous les domaines de la
société : dans l'éducation et la formation, dans la législation et le gouvernement - tout
simplement, partout.
Ce serait donc une grave erreur si les chrétiens abandonnaient ce champ de bataille de la politique
sans lutte, parce qu'il s'agirait d'un domaine pollué. Rien n'est plus nécessaire que des
politiciennes et des politiciens se chargent du rôle de prophètes disposés à être la voix de Dieu,
et à prendre position pour la Parole de Dieu. De telles personnes seront alors peut-être réellement
plus des prophètes que de simples politiciens. Il y aura toujours besoin de quelqu'un qui ose
dire : "il y a des choses fausses et des choses justes; ce que nous faisons en tant que
peuple est faux, etc." Même si la majorité continue malgré tout à choisir un autre chemin,
il faut qu'il y ait quelqu'un qui rappelle au moins aux hommes qu'ils prennent une mauvaise direction.
Q : Comment êtes-vous devenu chrétien?
Ph : C'est arrivé une nuit sur le Campus de l'Université, où je faisais mes études. Il y avait
là des personnes qui priaient et qui chantaient en plein air pendant toute une semaine - nuit
et jour, 24 heures sur 24. Je me suis assis au milieu d'eux, et je les ai observés. Et finalement,
j'ai pris la décision de demander à Dieu d'entrer dans ma vie; et je le Lui ai dit en silence... Ce
fut pour moi un événement très dramatique et définitif. Il était 1 heure du matin ce 6 février 1970.
J'avais 19 ans. C'était important pour moi de pouvoir mentionner un moment aussi précis pour ma
rencontre personnelle avec Lui; je m'y suis accroché souvent, lorsque survinrent des doutes
ultérieurement.
Q : Que s'est-il passé concrètement?
Ph : J'ai senti qu'un profond amour entrait dans mon cœur. Je me souviens, étant à genoux, de
m'être relevé et d'avoir vu un camarade d'études que je haïssais : c'était un rival. Soudain,
j'ai pris conscience que je l'aimais maintenant... et je l'ai embrassé sur la joue... à sa grande
stupéfaction!
Depuis lors, cet amour a toujours été présent en moi, même pour mes adversaires politiques ou des
personnes que, selon les circonstances, j'aurais dû haïr; par exemple, même pour un caricaturiste
de notre journal local, qui a souvent publié de très méchantes plaisanteries à mon sujet. Je prie
souvent pour lui. Le fait d'en être capable est pour moi une grande preuve de l'existence de Dieu.
Q : Votre mission actuelle vous conduit tout autour du globe. Quelles expériences vous
ont-elles marqué, plus particulièrement?
Ph : C'est un grand événement de regarder un homme dans les yeux au moment précis où il comprend
que Jésus-Christ est mort pour lui. Si mon vis-à-vis découvre qu'il y a de l'espoir, je suis saisi
d'un profond tremblement, tant est grande mon émotion. Je pourrais dire que c'est pour ces moments-là
surtout que je vis.
Cependant, la plupart des gens disent qu'ils iront "au ciel" parce qu'ils sont assez bons
pour cela! A un niveau plus profond de leur personnalité, ils savent pourtant pertinemment que ce
n'est pas vrai : ils n'en sont pas dignes. Aussi ont-ils essayé des centaines de fois de s'améliorer,
mais ils n'y sont jamais vraiment parvenu. Ils sont donc assis là, avec cette question permanente,
inexprimée : "Comment puis-je être sûr d'aller au ciel?"
Je leur explique alors l'amour de Dieu, et que le Christ a porté à notre place le châtiment et la
culpabilité pour nous. Lorsqu'ils comprennent que "Je ne suis pas obligé d'être assez bon,
mais je peux, oui, je dois faire confiance à un autre dans cette affaire, à savoir Jésus-Christ",
alors c'est comme si la lumière venait dans leur cœur, et cela se voit dans leurs yeux. Car c'est
cela la bonne nouvelle, l'Évangile! Lorsqu'on le comprend, c'est très bouleversant pour celui avec
qui je parle, mais aussi pour moi, car je vis vraiment pour ces occasions de me trouver devant des
êtres humains qui n'ont pas encore compris la vérité de Dieu, et de la leur révéler. Dans ces
moments-là, plus rien d'autre ne compte, et il m'importe peu que je travaille comme avocat, ou
président d'une société quelconque!
Source : Revue ACTE (Cadres Témoins de l'Évangile), 38e année, No 141, pages 14-21
(texte condensé).
- FIN -
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