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Les trois Adams.

  

*Résumés de livres*

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CHARLES MARTEL

Par Jean DEVIOSSE - Éditions « Le Grand Livre du Mois » (2006)


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8. Relations avec l'Église

Après Poitiers, c'est à cet homme nouveau, libéré de ses complexes neustriens et germains, que le pape va s'adresser directement. Et Karl tournera dès lors ses regards vers la Bourgogne, la Provence et la Narbonnaise arabe. C'est comme une révélation pour le Saint-Siège qui voit en Charles Martel le champion d'une politique anti-arabe et méditerranéenne, la seule qui puisse prétendre à la conduite prépondérante de l'Occident.

Pourtant, même 100 ans après sa mort, on continuera de dire que Karl a spolié beaucoup de biens de l'Église...On a même écrit : « C'est parce que le duc Karl, père du roi Pépin, fut le premier entre tous les rois et les princes des Francs à séparer et à prendre les biens de l'Église, que, pour cette seule cause, il est damné éternellement... » Mais d'autres ont pris sa défense à ce propos : « C'est parce que le majordome du palais a privé les églises d'une partie de leurs dîmes pour les attribuer à ses chevaliers par nécessité absolue, qu'il a gagné ses guerres... » Il ne faut pas non plus oublier de tenir compte d'un autre élément : le désordre qui s'était introduit dans l'Église, licence et débordements en tous genres. Pourtant, Karl fut un chrétien authentique, grosso modo certainement, mais il installait bien l'homme qu'il fallait, à la place qui convenait : politique capricieuse dictée en général par les impératifs du moment. On peut résumer son rôle en disant que Karl est parmi ceux qui ont le plus donné à l'Église, et parmi ceux aussi qui l'ont le plus dépossédée matériellement.

Il est certain que Charles Martel dépouilla l'Église d'une partie de ses biens, mais il usa pour se faire de divers moyens : pillage en pays ennemis, confiscation de terres appartenant à des évêques rebelles, actes de précaire arrachés, bon gré mal gré, aux évêques et aux abbés eux-mêmes. Ces confiscations lui ont permis d'asseoir solidement son pouvoir, et de contenir aussi la turbulente aristocratie franque.

Mais revenons à la lutte engagée contre les Musulmans. La poursuite de la libération se fit d'abord en Bourgogne, où Charles Martel se présente en libérateur de cette province du royaume. Il se présentait donc en libérateur en boutant les Arabes pour sauver les habitants... qui ne le demandaient même pas ! Du reste, il n'a même pas eu besoin de tirer l'épée, c'est pour son armée une simple promenade militaire. Évêques et Seigneurs, impressionnés par sa réputation, s'empressent de lui jurer fidélité, et les musulmans se retirent partout, redescendant le long du Rhône, en abandonnant à mesure toutes les villes conquises. Karl s'impose ainsi comme le « sauveur » venu reprendre la terre aux infidèles. Lyon, Vienne, etc. les villes tombent; et partout il installe des hommes à lui, chargés de parfaire la conquête et de contenir le pays, de protéger la province contre l'arabe, et surtout de réprimer d'éventuelles séditions.

Après d'importants tracas dans le Nord, en Frise où il écrase les Frisons et permet là encore la propagation du christianisme, il redescend vers la vallée du Rhône, bien décidé à reconquérir tout le Midi. Les chrétiens sont maintenant tyrannisés par les Autorités musulmanes auxquelles ils paient un tribut à Ocba, qui a succédé à Abd-er-Rahman, et qui veut conduire à son tour ses soldats d'Allah en Gaule. C'est alors que Karl décide de descendre sur la Provence; il regagne les territoires perdus, et partout sur la route il recrée une ossature administrative, avec des créatures à lui : gouverneurs, juges, préfets, et il leur laisse même des détachements de son armée pour les soutenir. C'est ainsi qu'il arrache peu à peu cette région aux Arabes ou aux petits despotes locaux. Avignon, Arles (la Rome gauloise) et enfin Marseille sont conquis. A ce moment, maître de la Provence, il réalise le vieux rêve mérovingien : s'installer sur la Méditerranée.

On pourrait penser que Charles fut accueilli en libérateur, mais non : les populations ne désiraient pas tant être délivrées des arabes, plutôt que d'être soumis à ces « gens du nord ». Les anciens maîtres ne demandaient que l'impôt du khsaradj, tout en respectant les droits des Seigneurs et les privilèges des villes... Seule l'Église s'accommodait mal de cette cohabitation. Cette expédition de Martel a plutôt renforcé les sentiments pro-arabes des maîtres Gallo-Romains. Les Francs s'étaient en effet comportés en pillards méthodiques, et les gouverneurs installés par Martel étaient despotiques... pour le plus grand profit d'Ocba et des armées islamiques. Alors, comment s'étonner que Arles, Avignon, Valence... et toute la rive gauche du Rhône aient été reprises pour la 5e fois par l'invasion musulmane de la Gaule, et jusque dans les vallées orientales des Alpes. Mais bientôt, l'intervention de Martel allait retourner encore une fois la situation.

Jusqu'au siège d'Avignon ce fut assez facile, mais la ville était réputée inexpugnable, et les Arabes s'y étaient fortifiés. Martel utilise tous les moyens : tir des machines à jet, béliers, mine et sape...catapultes, etc. L'ennemi multiplie les sorties et les lancements depuis les murailles. Charles et ses troupes attaquent les musulmans par d'autres endroits, les décimant en divers combats. Jusqu'à la dernière bataille dans la région des Vans. C'est l'été, favorable pour en terminer avec Avignon. La ville en mise à feu, et le carnage résultant des trous dans les murailles permet une victoire totale, et définitive cette fois-ci, sur les Arabes. Cette prise d'Avignon fut l'épisode le plus sanglant et le plus dur de toutes les campagnes de Charles Martel.

De suite, il réoccupe Marseille, puis conduit ses armées directement sur Narbonne. Depuis 18 ans, Narbonne était musulmane. Cité noble et riche, elle a subi tous les effets de l'arabisation, comme la mosquée dans l'atrium de l'église Sainte Rustique. Le khalife Omar avait trouvé cette ruse : il avait prescrit aux musulmans de partager les locaux des églises avec les chrétiens dans les villes emportées sans combat ! Cette citadelle arabe représentait donc un enjeu considérable. Comme à Avignon, les habitants essaient de se couper complètement des assaillants. La ville peut communiquer par un bras de l'Aude jusqu'à la mer, par où les musulmans attendent des secours promis. Pour éviter cette éventualité, Karl édifie des forts et des redoutes sur les deux rives du fleuve. Impatient, il essaie plusieurs assauts en vain. Le Wali d'Espagne a rassemblé une armée importante avec de nombreux navires... Karl, laissant une partie de son armée devant la ville, accourt à la rencontre de l'ennemi.

L'émir est tué; et les assaillants stupéfaits sont mis en déroute, essayant de regagner leurs navires sont poursuivis sur terre et sur mer par les soldats de Karl qui ont utilisé les barques des riverains... Mais finalement, Karl n'en retira qu'un énorme butin; et plus tard, les musulmans pour honorer le souvenir de leurs morts, élevèrent un mausolée dans les environs. Ils eurent le temps d'y prier, puisqu'ils demeurèrent encore 14 ans en terre narbonnaise... Mais pour ce temps-ci Karl avec son armée conquiert toutes les villes, comme l'écrit un enthousiaste : « Et sous la protection du Christ, gage du salut et de la victoire, Karl revint sain et sauf avec ses Francs dans sa principauté. »

En réalité, il ravage toute la Septimanie, le Vivarais et les Cévennes. Les arabes deviennent des esclaves dans les mines d'argent; c'est un véritable camp de concentration, et on enregistre rapidement une grande mortalité dans les colonies sarrasines. Après cette campagne, somme toute assez décevante, Karl retourne lutter en Austrasie; la Septimanie ne sera réunie à la couronne que par son fils Pépin le Bref, et encore, en 793, les arabes reprendront-ils Narbonne, après avoir franchi les Pyrénées, mais ils ne conserveront pas la ville, et se dirigeront sur Carcassonne. Son échec partiel, Charles Martel le doit certainement à la dispersion de ses efforts, mais pouvait-il du nord au sud, faire la guerre autrement que par des raids sanglants et rapides, aux lendemains éphémères?


9. Vers le futur

A la mort du roi Thierry IV, Karl imagine de ne pas choisir un nouveau roi. Il veut habituer les Francs à se passer d'un souverain, espérant que ses successeurs, eux, prendraient la couronne. Le petit Dagobert II, héritier du Trône, sera donc envoyé en Irlande, soit disant pour son éducation. Et c'est bien Charles Martel qui règne effectivement : il édicte les lois et rend la justice, et dès la mort de Thierry, son ascendant est tel qu'il se dispense de lui trouver un vrai successeur. C'est d'autant plus étonnant qu'il ne manquait alors pas d'héritiers possibles, en âge de régner, chez les Mérovingiens. Mais ce coup d'État n'eut pas de suite immédiate, puisque, à la mort de Charles, ses fils Pépin et Carloman qui lui succédèrent, furent contraints de donner un successeur royal à Thierry; ce fut Childéric III. Cependant, 10 ans plus tard, c'est le fils de Charles Martel, Pépin, qui, à 37 ans, détiendra effectivement le pouvoir, appuyé particulièrement par la papauté.

L'Église, pour la première fois, en ce temps là, introduisait en effet le Sacre dans la royauté, chez les Wisigoths et les Anglo-Saxons. Naturellement, cela devait se passer semblablement pour les Francs : « le roi détiendra désormais son pouvoir de Dieu, qui l'a élu pour guider le peuple chrétien ». Le pape Étienne II fit alors très bien les choses : il sacra reine des Francs l'épouse de Pépin (Berthe aux grands pieds) ce qui revenait à légitimer la succession pour ses descendants ! De la sorte, après un siècle, disparaissait cette forme boiteuse de gouvernement, assise sur l'inertie d'un roi, et sur la toute puissance réelle des majordomes.

En attendant, la Gaule est sans roi, et Charles Martel gouverne seul. En hiver 737, il prépare une nouvelle expédition contre les Saxons qu'il mate, et à qui il impose un tribut. Puis, l'anarchie régnant en Provence avec l'appui des musulmans qui sont encore de retour, il est obligé de reprendre la route du Midi, et entre bientôt – encore une fois – en vainqueur à Marseille. Il fait même exécuter l'Évêque de Viviers, qui était devenu un allié des Arabes !

Mais cette fois, le rôle militaire de Charles Martel semble se terminer. L'empire franc est totalement restauré et agrandi, du Danube et de la Weser à l'Atlantique, et à la Méditerranée. La Neustrie, l'Austrasie et la Bourgogne acceptent le Gouvernement du Palais. C'est le temps de la paix, et désormais Karl ne quittera plus guère sa villa du Quierzy.


10. Mort de Charles Martel

Ne voulant pas voir s'installer un roi à Rome qui serait tracassant pour lui, le pape adressa une demande à Karl de venir l'aider avec ses troupes. Il accompagnait la supplique de sa délégation de somptueux cadeaux : comme des « fibres des liens qui avaient garrotté Saint-Pierre », et la reproduction des clefs de son tombeau ( !). Sans compter le titre de Consul, assorti d'une justification digne des princes du Sénat romain (sous le titre exact de « Patrice »). Mais Karl refusa cette proposition avec diplomatie. Il déclinait, et se trouvait désormais sans force...

Des signes apparaissaient dans le ciel, et le peuple se refusait d'admettre que la fin de son héros était proche. Pour tous, il n'était pas un simple mortel ! Dès son retour de sa dernière campagne pourtant, il était tombé malade avec une forte fièvre. On dut le conduire à Paris en basterne, où il s'abîma en prières sur la tombe du bienheureux martyr Denis... Mais les miracles ne se produisent qu'une fois, et il meurt, inconscient, au mois d'octobre 741.

L'inhumation eut lieu dans la Basilique de Saint-Denis, au milieu de nombreuses sépultures royales. Cette dernière demeure qu'on lui assignait était bien digne d'un roi. Déjà on comparait Charles Martel au Josué de la Bible. N'avait-il pas fait, comme l'Hébreu, la conquête d'un « grand Canaan »? Ses 25 ans de fer et de feu ont certes engendré une véritable révolution politique et sociale. Mais l'influence des grands va subsister désormais, et une aristocratie terrienne et guerrière, avide et turbulente, va représenter toute la force du Royaume. Et la vie de Charlemagne – comme celle de Karl – va se passer bientôt à courir du nord au midi, frappant tour à tour le paganisme germain et l'islamisme arabe. Et l'État religieux carolingien s'imposera finalement, comme la suite « chrétienne » du royaume profane des Mérovingiens.

Ainsi, à Saint Genis, s'achève l'histoire et l'aventure de Charles Martel et commence aussi sa légende.


ANNEXES : Suivent pour terminer cette abondante documentation un « Choix de textes » volumineux, tels que La loi Salique, la Charte de Charles Martel tirée des Archives de Saint-Denis, la « Venance Fortunat à Félix, Illustre Patrice de Toulouse », un Tableau généalogique et un « Appendice sur les Sources de l'Histoire de la Bataille de Poitiers ». Enfin, une abondante bibliographie en plus de celle qui se trouve au bas des pages, une chronologie et 2 cartes terminent cet ouvrage de 335 pages. C'est la seule Histoire complète de la vie de Charles Martel, publiée à ce jour en français.

- FIN -

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